1 – La Fédération nationale de la Libre Pensée se réclame depuis toujours de l’antimilitarisme internationaliste et pacifiste. Elle condamne toutes les guerres impérialistes et les « opérations extérieures » qui ne sont que relents de conquêtes colonialistes. Selon l’expression de Paul Valéry : « Les guerres sont faites par des gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui se connaissent très bien, mais qui refusent de s’entretuer ».
Le Congrès national de la Libre Pensée, réuni à Evry du 22 au 25 août 2017, rappelle sa condamnation des bombardements et des destructions effectués partout dans le monde. Elle rappelle que la guerre est sur tous les continents et massacre des centaines de milliers d’hommes, de femmes, d’enfants et de vieillards. Qui plus est, « Le déplacement forcé atteint un niveau sans précédent. 65,3 millions de personnes étaient déracinées à la fin de 2015” selon le rapport annuel du HCR de l’ONU (20 juin 2016). Répétons-le : la guerre est une barbarie.
La Libre Pensée rappelle son engagement de toujours contre le militarisme et réaffirme le principe fondamental du droit des peuples à disposer d‘eux-mêmes et non du droit des puissants à disposer des peuples. Elle renouvelle sa dénonciation du « droit d’ingérence » qui n’est que le maintien de l’oppression coloniale.
Le Congrès d’Evry renouvelle son exigence de l’arrêt des interventions militaires extérieures dans tous les pays et le retrait des troupes d’occupation. Le congrès tire un bilan calamiteux du quinquennat Hollande à ce point de vue ; il a continué, comme son prédécesseur, à s’ octroyer un rôle de gendarme dans le monde, en intervenant en Afrique, au Moyen-Orient, en envoyant ses Rafales depuis le porte-avion De Gaulle pour des raids de représailles insoucieux de la population civile et en apportant en Syrie son soutien à des mouvements censés incarner un renouveau par rapport au régime existant.
Outre que ce rôle de gendarme du monde est manifestement disproportionné avec ses capacités militaires, il fait peser sur la population française des charges financières insupportables. Enfin, et ce n’est pas le moindre de ses défauts, ce rôle de gendarme met à mal, et gravement, l’humanisme dont devrait être porteur le pays des Droits de l’homme. L’état d’urgence entretient dans la population française une inquiétude permanente sur laquelle prospèrent les peurs et les fantasmes de toutes natures.
Le terrorisme militaire des opérations néo-coloniales nourrit en retour les actes barbares que connaissent différents pays aujourd’hui. La résolution de Bourg-lès-Valence indiquait ceci en 2016 : « La Libre Pensée exprime sa totale empathie avec les migrants qui veulent fuir la barbarie et la mort. Elle en appelle à la solidarité internationale pour leur apporter aide et secours et pour faire respecter leur désir d’installation dans le pays de leur choix. » On ajoutera cette année la condamnation du pacte infâme conclu entre l’Union européenne et le dictateur Erdogan pour qu’il parque sur le territoire turc les migrants venus de tous les pays d’Asie fracassés par les guerres incessantes déclenchées par les puissances mondiales. L’accord UE-Erdogan s’est fait moyennant des compensations financières considérables. Inqualifiable « donnant donnant », produit d’un honteux marchandage !
Les premiers pas du quinquennat Macron ne disent rien qui vaille aux militants anti-guerres que nous sommes. La descente des Champs-Elysées en command car par le nouveau Président de la V ème République, sa visite, immédiatement après qu’il eut nommé le nouveau gouvernement, au contingent impliqué dans l’opération Barkhane au Mali, qui lui a donné l’occasion d’affirmer avec force son rôle de « chef de guerre », la réaffirmation de l’objectif de 2 % du PIB à consacrer à la défense (2% du PIB représentent un pourcentage considérable du budget de la Nation), tout cela ne laisse pas augurer une politique tournée vers la paix. La nomination de Jean-Yves Le Drian, grand négociateur de la vente d’armes au profit des fabricants français, au poste de ministre d’Etat aux affaires étrangères est une indication allant exactement dans le même sens. Pas de quoi rassurer les forces pacifiques dont nous faisons partie et qui militent pour un monde apaisé.
Comment ne pas condamner aussi le bombardement éclair récemment ordonné par Donald Trump d’une partie du territoire syrien désignée par lui comme un lieu contrôlé par le régime de Bachar El Hassad et dont la population civile, de ce fait, aurait mérité le carnage dont elle fut victime, opéré par les missiles made in USA. Voilà qui devrait accabler de honte les « intervenants » à tout crin qui tiennent le haut du pavé dans le petit monde des médias et de l’intelligentsia au service de puissants ! Mais ces gens-là n’ont pas de honte.
2 – Soulignons que l’action ininterrompue et unitaire de la Libre Pensée pour la réhabilitation collective des 639 Fusillés pour l’exemple s’inscrit pleinement dans cette condamnation des horreurs actuelles, car elle est la marque d’une volonté de dire Non à la Guerre et de promouvoir le droit de dire Non à l’oppression et aux massacres de la barbarie militariste.
Rappelons à ce propos ce que nous disions à Bourg-lès-Valence :
« La Libre Pensée s’est fixé pour but de faire un travail de vérité au milieu du déferlement des « reconstitutions » officielles diverses et variées où le ridicule le dispute souvent à l’autosatisfaction hypocrite d’une paix prétendument garantie par l’Union européenne. Autosatisfaction oubliant au passage la guerre de dislocation menée contre l’ex-Yougoslavie par l’OTAN, dont les pays de l’Union Européenne sont membres, ainsi que les interventions et immixtions diverses via des opérations militaires et des ventes d’armes dont se rendent coupables nombre de pays de l’Union Européenne ! Et singulièrement la France, « pacificatrice » bien connue, dont les dirigeants s’obstinent à perpétuer le passé colonial, sous d’autres formes politiques sans doute, mais en continuité complète avec le militarisme, ennemi des libertés et vice ancestral récurrent de notre pays. »
Ce travail de vérité reste plus que jamais d’actualité. C’est pourquoi La Libre Pensée décide de le poursuivre et de l’amplifier.
La L.P. se félicite des 120 rassemblements organisés en 2016 autour du 11 novembre pour la réhabilitation collective des Fusillés pour l’exemple. Le 11 novembre 2016, dans le lieu emblématique de notre combat, à Gentioux, un demi millier de citoyens se sont rassemblés pour dire non à la guerre et rendre hommage à tous ceux qui ont osé s’opposer à la guerre de 1914 à 1918. Tel était le sens également des rassemblements, de Maizy sur le Chemin des Dames, à la Courtine en Creuse en hommage aux soldats russes et à leur soviet, de Villeurbanne, d’Ambierle, de Franchesse, d’Angers et de Marseille. Avec l’U.P.F., l’A.R.A.C., le Mouvement de la Paix, de nombreuses sections de la LDH et de plus en plus fréquemment les syndicats C.G.T. et C.G.T.-F.O., les citoyens ont pu exprimer leur refus du militarisme et prendre confiance en la force de leur mouvement.
Ainsi nous honorons les Fusillés pour l’exemple, les déserteurs, les insoumis, les révoltés, tous ceux pour qui l’Humanité ne peut se conjuguer avec tuerie et barbarie. Fidèles aux socialistes internationalistes allemands, avec Karl Liebknecht, toujours, hic et nunc, nous pleurons les morts et nous voulons sauver les vivants.
Nous pouvons observer que malgré le déploiement médiatique lors des cérémonies officielles de commémoration, malgré la volonté de l’Etat et de certains historiens autorisés, qui pensaient avoir « réglé » la question en 2013, en réunissant fusillés et fusilleurs dans le Musée des Armées aux Invalides, le problème de la réhabilitation est resté présent et n’a pu être occulté. Il est assez paradoxal, mais c’est un fait, que l’un des partisans les plus compétents et convaincus de la réhabilitation collective des Fusillés pour l’exemple, effective et non frelatée, ait été le général Bach, qui est mort en mai dernier, et à qui la Libre Pensée a rendu hommage pour sa probité intellectuelle. Ses positions n’étaient pas les nôtres sur tous les plans, mais la Libre Pensée fut honorée de travailler avec celui qui restera dans la mémoire comme une figure d’une extrême rareté, à savoir un militaire intelligent et soucieux d’une justice humaine, y compris dans le chaos de la guerre.
Un grand pas en avant depuis l’an passé avec la recherche des descendants des fusillés. Le travail que plusieurs fédérations ont entrepris avec ténacité a permis que l’on retrouve les descendants de 28 fusillés et que l’on obtienne, à ce jour, 56 signatures de familles. Il faut poursuivre et élargir notre recherche.
Le colloque de Toulouse, sur le problème des nations, dont les Actes sont aujourd’hui disponibles, a été la quatrième étape de la réflexion organisée par la L.P. sur la guerre de 1914 et les questions qu’elle pose à tout citoyen. Il va être suivi par le colloque de Lyon consacré à Pétain, en cette fin d’année 2017.
Le travail sur les monuments a été relancé. Les réunions tenues à Tarnos, St Lys, Villeurbanne… ont permis un approfondissement de nos recherches : nous avons ainsi découvert comment des maires se sont battus à la sortie de la guerre pour que le monument de leur commune témoigne, parfois clairement, parfois d’une manière un peu cryptée, de leur attachement au pacifisme. Nous souhaitons que chaque Fédération enrichisse son travail par la recherche des monuments à tendance pacifiste, de leur histoire, souvent passionnante, toujours éclairante. A chaque fois, on constate que l’érection d’un monument a été un enjeu politique.
C’est encore le cas aujourd’hui et nous le voyons avec la bataille que nous menons pour qu’existe un monument en hommage aux fusillés pour l’exemple. Les deux dernières années ont permis la mise en place de l’association qui lui est consacrée, la recherche de sculpteurs, et la collecte des fonds nécessaires (déjà plus d’un tiers de la somme totale). Avec le lieu d’implantation de ce monument, nous allons pouvoir déployer les interventions auprès des citoyens, des communes, des assemblées territoriales, et voir la réalisation de cette œuvre.
La Libre Pensée se fixe pour objectif qu’il soit érigé fin 2018. Le Congrès demande aux Fédérations départementales, dès que le lieu d’implantation du monument, sera connu de contacter les milliers de collectivités territoriales qui ont pris position pour la réhabilitation collective des Fusillés pour l’exemple, afin de les solliciter pour qu’elles contribuent financièrement au monument.
La CAN fournira aux fédérations un dossier-type pour solliciter des contributions financières auprès des collectivités territoriales.
Le Congrès national d’Evry de la Libre Pense appelle aussi à augmenter le nombre de rassemblements pacifistes autour du 11 novembre 2017.
Résolution adoptée à l’unanimité, moins 2 Abstentions