La Fédération nationale de la Libre Pensée appelle à manifester
Les 16 et 20 mars 2021
■ Contre la loi « Sécurité globale »
■ Contre les 3 décrets sur le fichage des militants
■ Contre la loi « Séparatisme »
A propos de l’Article 24 de la loi « Sécurité globale » : Le point de situation
Au terme de première lecture de la procédure accélérée d’examen de la proposition de loi relative à la Sécurité globale, l’Assemblée nationale a transmis au Sénat un texte prévoyant, en son article 24, d’introduire dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse un article 35 quinquies ainsi rédigé: « Sans préjudice du droit d’informer, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, dans le but manifeste qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification, autre que son numéro d’identification individuel, d’un agent de la police nationale, d’un militaire de la gendarmerie nationale ou d’un agent de police municipale lorsque ces personnels agissent dans le cadre d’une opération de police. » Par cette rédaction, il s’agissait donc de modifier la loi du 29 juillet 1881 consacrant la liberté fondamentale d’informer en interdisant la diffusion d’images du visage ou des éléments d’identification – à l’exception du numéro de matricule – des agents publics, au sens large, exerçant des missions de police, qu’ils aient un statut civil ou militaire. La peine encourue était déjà lourde : un an de privation de liberté et 45 000 euros d’amende.
Ce qu’était l’Article 24, hier
Devant la levée de bouclier suscitée à juste titre par l’article 24 de cette proposition de loi, qui remet en cause la liberté de la presse dans la mesure où il considère comme délictueuse la diffusion des images dans la seule intention, certes manifeste mais pratiquement très difficile à établir, d’atteindre « l’intégrité physique ou psychique » des forces de police et de gendarmerie, le Sénat avait promis de réécrire le texte, le gouvernement n’ayant pas réussi à convaincre sa majorité de le revoir ni à vendre l’idée à l’opinion et aux représentants de la Nation qu’il allait saisir une commission extra-parlementaire pour ce faire. On pouvait espérer que la Haute Assemblée, parfois attachée à préserver les libertés publiques et individuelles, s’emploierait à atténuer ou supprimer un délit fondé sur la seule intentionnalité. En réalité, le Sénat a accentué la dérive sécuritaire.
La Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel et du règlement d’administration générale du Sénat a surmonté la maladresse de l’auteur de la proposition de loi, M. Jean-Michel Fauvergue, ancien chef du service Recherche, assistance, intervention, dissuasion (RAID) de la police nationale1 : elle a entendu simplement introduire un article 226-4-1-1 nouveau dans le Code pénal sans toucher à la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. La rédaction du 4 mars 2021 issue de cette commission peut donc donner à penser que la liberté d’informer est sauvée. En réalité, elle demeure menacée et sans doute plus gravement qu’au sortir de la première lecture à l’Assemblée nationale.
Ce qu’il est aujourd’hui
Le simple fait de provoquer « […] dans le but manifeste qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, à l’identification d’un agent de la police nationale, d’un militaire de la gendarmerie nationale ou d’un agent de la police municipale lorsque ces personnels agissent dans le cadre d’une opération de police […] » constituerait un délit dont le quantum de la peine encourue est plus important : cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende au lieu respectivement d’une année et de 45 000 euros. Il ne serait plus besoin de commettre un acte de diffusion d’images avec intention de nuire, la simple provocation, c’est-à-dire la menace de publier ou l’incitation à le faire, suffirait à constituer le délit. Si la condition de l’intention malveillante est maintenue dans les mêmes termes, elle reste par elle-même, comme dans la version initiale votée en première lecture à l’Assemblée nationale, une garantie extrêmement fragile. Par exemple, un journaliste qui inciterait une de ses sources à rendre public l’enregistrement sur un téléphone portable de scènes de maintien de l’ordre pourrait être poursuivi.
Par ailleurs, la commission étend le délit de provocation à la diffusion d’images dans une intention malveillante au conjoint et aux enfants de l’agent.
Retrait des mesures liberticides : lois et décrets !
En définitive, le but recherché dans les deux cas est bien de rendre impossible la publication d’images des forces de l’ordre agissant en dehors du cadre légal. Les conditions de répression des manifestations de Gilets jaunes et de travailleurs appellent le secret pour le pouvoir. L’article 24 doit donc être purement et simplement abandonné, quelle que soit la version envisagée. Les dispositions actuelles du Code pénal et des articles 35 et suivants de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse suffisent. L’article 226-2 du Code pénal punit déjà d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende « […] le fait de conserver, porter ou laisser porter à la connaissance du public ou d’un tiers ou d’utiliser de quelque manière que ce soit tout enregistrement ou document obtenu […] », comme dans les conditions prévues à l’article 226-1, à savoir « 1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ; / 2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé. / 3° En captant, enregistrant ou transmettant, par quelque moyen que ce soit, la localisation en temps réel ou en différé d’une personne sans le consentement de celle-ci. » De surcroît, l’article 226-4-1 du code pénal réprime le fait « […] de faire usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, [ et prévoit une] d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. »
Les 16 et 20 mars 2021 : Tous dans la rue pour la défense des libertés !
Le mardi 16 mars devant le Sénat à Paris et les préfectures/sous-préfectures en régions (infos à venir).
Le samedi 20 mars lors des marches des collectifs de familles et victimes de violences policières, notamment celle qui se déroulera à Paris de la place Edmond-Rostand vers Bastille.
Paris, le 12 mars 2021
Les membres du RAID agissant le plus souvent revêtus d’une cagoule et d’un casque intégral ont pourtant peu de chance d’être identifiés. ↩