Espagne : Quand les grenouilles auront des cheveux…

La laïcité abandonnée par « le nouveau progressisme politique »

par Francisco Delgado1

Dans le récent accord de gouvernement habilité entre PSOE et plate-forme politique Sumar2 est abandonné le moindre début de construire la Laïcité. Y compris de faire quelque part en faveur de la laïcité institutionnelle.

Durant la 14e législature, il n’y a pas eu la moindre avancée en faveur de la laïcité, des institutions de l’État, c’est-à-dire de construire l’État laïque. Et ceci alors que dans le dans le congrès, il y avait une majorité de sièges de centre-gauche. Évidemment, (en matière de laïcité), encore entre le PSOE et Sumar, s’ils parviennent à construire un nouveau gouvernement, dans cette 15e législative qui commence à avancer, la situation sera identique.

Je rappelle, « Jusqu’à ce que les grenouilles aient des cheveux », en insistant sur le fait que la droite politique (y compris, la droite nationaliste, les choses sont très clairement dites: «La laïcité ? Pas question ». Mais le (prétendu) «  Progressisme » politique, même si il ne le dit pas, le fait : la laïcité ? Rien de rien ! Cela vient d’être démontré par cet accord PSOE-Sumar qui vient d’être signé. Dans les 230 mesures et les 48 pages du document qui a été rendue public, rien de rien n’apparaît. Sauf le mot « laïcisme », une seule fois et honteusement pour ratifier ce que déjà affirme la très confessionnelle et adepte de la privatisation, la loi LOM-LOE, à savoir que « la note de religion ne sera pas prise en compte pour l’évaluation finale des élèves, sauf pour la religion ». Sujet déjà bien établi.

En Espagne, la laïcité institutionnelle arrivera lorsque «les grenouilles auront des cheveux»

Est abandonné le moindre signe de pouvoir construire un État laïque. Y compris de faire quelques petits pas en faveur de la laïcité institutionnelle.

« Zéro pointé » en matière de laïcité.

C’était prévisible, et il y a là, rien de nouveau, étant donné les « Fibres », politiques des dirigeants, du PSOE et des personnes, des groupes politiques qui composent SUMAR.

Rien n’est dit, sur la promotion d’une « loi de la liberté de conscience », si nécessaire et demandée, pour pouvoir laisser de côté l’actuelle et vétuste loi de liberté religieuse de 1980 ; pas un mot sur le fait de clore/abroger (ou même -, moins que réactualiser) le Concordat de 1979.

● Pas question de sortir la religion de l’école et de ne pas financer, de la part de l’État, les centres éducatifs dogmatico–confessionnels ; pas un mot sur le fait d’inverser, les honteuses immatriculations, moyennant une loi au Parlement et la modification de l’actuelle loi du patrimoine historique artistique ;
● Pas question d’éliminer les aumôneries catholiques de l’armée, des centre pénitentiaires ou hôpitaux ;
● Pas question d’éliminer la case dans l’IRPF (l’Impôt sur le revenu) pour le financement de l’Église catholique ;
● Pas question de d’éliminer les innombrables exemptions d’impôts concédées à l’Église catholique ; pas question de faire tomber le symbole national-catholique, par excellence : la foutue croix de 150 mètres de hauteur (juste une allusion à une« réinterprétation », mémorielle du monument)…

● Sauf erreur, pas question d’abroger le délit de blasphème

● Déclarer une vierge mère perpétuelle est une aberration et une insulte à l’intelligence.

En résumé, l’accord ne prévoit pas la construction d’un État laïque. Même pas quelques petits pas. Et le plus grave, c’est qu’il ne s’agit pas d’un oubli : c’est fait sciemment.

Pour la politique, la laïcité institutionnelle est un obstacle gênant. La laïcité institutionnelle n’est pas une priorité. C’est plutôt un frein, et d’ailleurs, de temps en temps, on fait certains pas en arrière, à cause d’un empressement multiconfessionnel excessif et erroné, et d’une proposition fantaisiste, prétendument progressiste.

Une démocratie à part entière est inconcevable sans laïcité institutionnelle. La laïcité, c’est-à-dire la lutte pour un État laïque dans le cadre d’une société plurielle, comporte une forte composante d’idéologie républicaine.

Il est très clair, au vu des faits, que les progrès dans ce domaine sont retardés, parce que la démocratie dont nous souffrons actuellement est l’héritière du national-catholicisme monarchique (de la Croisade de 1936…) soutenu par tous les partis politiques, sans exception.

La laïcité pour moi, c’est « à moi on ne me la fait plus », la laïcité est synonyme de démocratie, celui qui ne le comprend pas n’est pas un démocrate. Séparer l’État des religions, des idéologies particulières devrait être une priorité, celui qui ne comprend pas cela n’est pas un démocrate… Même s’ils ont beau se dire de gauche, libéraux, socialistes, communistes ou sociaux-démocrates.

Francisco Delgado

 

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  1. Francisco Delgado Ruiz, est président de l’association Europa Laica. Membre de l’AILP 

  2. Sumar (en français : « rassembler, additionner »), formellement Mouvement Sumar (Movimiento Sumar), est un parti politique espagnol de gauche, constitué en 2023 par Yolanda Díaz.